
15 %. C’est le chiffre qui refuse de disparaître des rapports sur la richesse en France : malgré l’accès des femmes aux diplômes, malgré leur présence accrue dans les sphères de décision, la répartition des biens continue de pencher. Selon l’Insee, les femmes possèdent toujours moins que les hommes, et l’écart grimpe encore dans les milieux les plus fortunés. Ni le niveau d’étude, ni la montée en responsabilité ne suffisent à effacer ce déséquilibre, qui s’affirme même au sommet.
L’héritage, la fiscalité et une architecture immobilière verrouillée pèsent lourdement sur la capacité des femmes à bâtir leur patrimoine, surtout en ville où le jeu se durcit. Les trajectoires qui s’élèvent restent l’exception, même pour celles qui occupent la lumière des projecteurs.
Pourquoi les femmes politiques restent-elles en retrait dans la constitution du patrimoine ? Décryptage des inégalités persistantes
Quand on s’attarde sur le parcours des femmes politiques, un constat s’impose : l’accumulation de patrimoine se heurte à des obstacles qui plongent leurs racines loin dans l’histoire sociale. La division sexuée du travail, héritage de normes familiales bien ancrées, façonne encore les itinéraires professionnels, ralentit l’ascension sociale et grignote le temps dédié à la construction de richesses tangibles.
Les tâches du foyer ? Toujours à la charge des femmes, même quand elles siègent au sommet. Ce travail invisible, rarement reconnu, limite concrètement la possibilité d’investir, de gérer, d’anticiper. Moins de temps pour acheter, gérer un bien, surveiller une épargne : la différence se creuse dans la durée.
Entrons dans la sphère familiale. La transmission du patrimoine ne se joue pas à armes égales. Les schémas traditionnels cantonnent souvent les femmes au rôle de passeuses de valeurs, d’éducation, alors que les titres de propriété et les biens matériels circulent toujours davantage du côté masculin. Les travaux de Sibylle Gollac (CNRS, sociologie EHESS) l’ont montré : ces répartitions perdurent, des quartiers populaires aux milieux plus aisés, à Paris comme à Lyon. Et c’est tout l’espace social qui s’en trouve marqué.
Sur le plan institutionnel, rien n’aide vraiment à rééquilibrer la donne. La Convention de 2003 de l’UNESCO, par exemple, reste muette sur la contribution des femmes à la transmission du patrimoine immatériel. Résultat : leur rôle s’efface dans la reconnaissance officielle, et le patrimoine des femmes demeure peu protégé, peu valorisé.
Regardons un exemple concret. Considérez la fortune de Catherine Vautrin. Ce cas, détaillé sur la page « La fortune de Catherine Vautrin : ce qu’on sait du patrimoine politique – Capitalio », soulève la question de la transparence, mais surtout celle des parcours individuels, des héritages, de la capacité réelle des femmes à s’imposer comme propriétaires, même lorsqu’elles pèsent dans l’arène politique.
Trajectoires urbaines, leviers d’action et perspectives pour renforcer le patrimoine féminin
Les trajectoires sociales des femmes politiques croisent des réalités urbaines mouvantes. Qu’on parle de Paris, Lyon ou Lisbonne, les choix de quartier, les déplacements, les réseaux de soutien : tout pèse sur la capacité à acquérir un bien, à faire croître un patrimoine féminin. La sociologie urbaine éclaire ces évolutions : classe sociale, liens familiaux, opportunités de carrière se mêlent différemment selon les villes et les contextes, dessinant des parcours multiples.
Les recherches menées par les presses universitaires de Lyon et à l’université Laval (Québec) le confirment : les femmes qui parviennent à se constituer un patrimoine en ville suivent des itinéraires variés, souvent marqués par la nécessité d’articuler vie professionnelle, mobilité et réseau d’entraide.
La transmission de certaines pratiques culturelles, broderie, cuisine, poésie orale, se fait largement par les femmes. Là, elles trouvent de véritables leviers d’émancipation. La broderie en Palestine ou le landay afghan, par exemple, montrent que ces traditions peuvent renforcer l’autonomie et l’identité, parfois même offrir une forme de sécurité économique.
Mais le tableau n’est pas sans contraste. La présence féminine dans les directions du secteur culturel demeure faible : 33 % de directrices au ministère de la Culture, 11 % dans le privé, alors que les écoles supérieures de culture comptent 61 % de femmes. L’ascenseur social ne fonctionne pas partout à la même vitesse.
Pour mieux saisir les défis à relever, voici les principaux leviers sur lesquels agir :
- Transmission culturelle : moyen de renforcer l’autonomie, de gagner en reconnaissance.
- Mixité : passage obligé vers une répartition plus juste des biens et des positions sociales.
- Perspectives : encourager l’évolution des mentalités, mettre en avant les réussites féminines, diversifier les chemins d’accès à la propriété.
Du côté des institutions, les lignes bougent, lentement. L’Union européenne, le Portugal ou le Québec multiplient les dispositifs pour ouvrir aux femmes l’accès aux ressources et à la propriété. Les déplacements résidentiels, les parcours professionnels et l’investissement dans la culture offrent des pistes concrètes pour reconfigurer la carte du patrimoine au féminin.
Demain, les clés du coffre-fort patrimonial pourraient bien changer de main, si les trajectoires féminines gagnent enfin la visibilité et la latitude qu’elles méritent.